Dans mon interprétation du Kung Fu, j’aime dire que nous avons trois moyens de générer de la puissance, formant une trinité que j’appelle la Terre, le Ciel et l’Homme, ou autrement dit, la structure, l’intention et le souffle, aussi connus sous les noms de Shen, Yi et Qi. Derrière cette appellation ésotérique se cache une réalité plus simple à appréhender, que je vais vous expliquer à travers l’exemple du coup de poing en trois formes.
1. La Terre (Shen, la structure, le Dantian inférieur)
Cette énergie puise ses racines dans l’ancrage et la stabilité. Dans le Hung Gar, par exemple, elle se manifeste par la transition entre le Mabu (position du cavalier) et le Gongbu (position de l’arc et de la flèche). La jambe arrière donne l’impulsion, la force transite à travers chaque articulation, la hanche déploie l’énergie, le tronc se solidifie pour permettre la propagation de cette force, l’épaule lance le bras, et le poing part comme un boulet de canon. C’est le principe de l’énergie terrestre, qui tire sa force du sol et additionne la contribution de chaque articulation, en minimisant les gestes parasites.
2. Le Ciel (Yi, l’intention, le Dantian supérieur)
Cette énergie dépend moins de l’ancrage et davantage de la spontanéité et du relâchement complet du corps, permettant de frapper comme un fouet. Ici, la force émane de l’intention et, plus mécaniquement, de la zone scapulaire et des épaules. Le haut du corps initie le mouvement, générant une énergie cinétique qui se propage à travers les bras. Ceux-ci deviennent des fouets ou des boules destructrices, capables de fendre l’air grâce à la rotation des épaules. Cette énergie cinétique, créée par la combinaison de la vitesse, de la fluidité et de la rotation, permet de libérer une force explosive. On retrouve cette approche dans des styles comme le Choy Lee Fut ou le Dong Bei Quan, où le relâchement et la rapidité sont primordiales. Les membres inférieurs suivent le mouvement du haut du corps, créant un cycle de relance et de frappe continue.
3. L’Homme (Qi, le souffle, le Dantian moyen)
Cette énergie, à la fois complexe et naturelle, est présente dans le Pak Mei et les styles anciens de Wuzu Quan. Nous la maîtrisons tous depuis l’enfance, par des actions comme éternuer, bailler, avoir le hoquet ou tousser. C’est d’ailleurs en toussant que je fais découvrir cette énergie : en frappant tout en toussant fortement. Pour illustrer cette force, on peut la comparer à un volcan en éruption. Comme un volcan qui accumule une pression immense sous une surface calme, le pratiquant accumule son énergie intérieure. Puis, à un moment précis, cette énergie est libérée de manière explosive, projetant une force irrésistible vers l’extérieur. Le diaphragme se contracte, le dos s’arrondit, et une grande force de contraction et de rétraction se déploie, que j’appelle « cracher ». L’inverse, qui consiste à redresser soudainement son dos en inspirant fortement et en poussant vers l’extérieur, s’appelle « avaler ». Cette énergie est brève, explosive, et très dépendante de la technique ainsi que des muscles profonds. Elle combine les deux premiers aspects, à savoir une structure inébranlable et un esprit affûté, permettant d’unir les trois forces.
Kevin Kim Heng



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